C’est mon anniversaire aujourd’hui, aussi je vous délivre un nouvel article !
Suite de l’épisode 8.
Qui est Paulette ?
C’est la femme de Praline. Elle est institutrice à l’école communale de Praz sur Arly.
C'est une bonne vieille école qui sent bon la craie, l’encre et l’odeur du poêle qui vient réchauffer les élèves « quand la bise fut venue… »
Paulette Chabaud sera en quelque sorte notre productrice, elle va nous avancer l’argent afin que nous puissions nous équiper en matériel de sonorisation, magnétophone Revox B77, micros, ampli et haut parleurs.
Double casquette, institutrice-productrice ! Et elle a de la poigne croyez-moi, aussi bien avec nous qu’avec ses élèves.
De par sa fonction, elle est logée au-dessus de l’école et nous l’entendons de sa voix puissante recadrer certains d’entre eux avec force et détermination.
Nous en rions avec Louis, son mari.
Les élèves un peu moins car lorsqu’elle tire les cheveux, elle ne fait pas semblant…
Louis et moi, composons notre spectacle. Certains sketches seront empruntés aux frères ennemis, à Jean Yanne, d’autres viennent du Club Med ou bien du fond de nos circonvolutions cérébrales.
Grande nouvelle! Pour faire plus mâle, j'ar
bore, comme mon partenaire de scène, une paire de bacchantes!
Paulette s’occupe aussi de tout ce qui est intendance.
Bernadette étant partie quelque temps en stage, je reste déjeuner et dîner chez eux. Il y a Fanny et Manu, leurs deux enfants que j’ai vu grandir peu à peu, à qui je fais de grosses bises.
Qu’elle est bonne la soupe de Paulette quand on a froid. Que l’on apprécie sa raclette ou sa fondue ! Que de beaux réveillons passés ensemble !!!
Mais Paulette nous donne aussi son avis sur la qualité de notre travail. Soit elle éclate de rire ou bien elle sourit avec courtoisie et part faire la vaisselle, ça veut tout dire…
Quel couple hors norme que Paulette et Louis, une enseignante et un artiste !
Avec Louis, nous aménageons à Megève notre « Café de la Gare » à nous, .
Il est artiste peintre et il fait de ce lieu, un peu glauque, un café-théâtre digne de ceux qui existent à Paris. J’essaye de me rendre utile en montant les bandes son, préparant les accessoires et en faisant le chauffeur, car Louis n’a pas son permis.
Enfin notre première représentation ! 
Nos deux femmes s’occupent de la régie son et lumière. De temps en temps, elles jouent avec nous sur scène.
Le public n’est pas nombreux, mais il a l’air d’apprécier. Ensuite tous les quatre, après les saluts, allons nous « montrer » dans les boîtes à la mode afin de faire notre promo.
Pour les habitants de Megève, nous sommes les rigolos locaux, on peut dire que nous sommes acceptés assez facilement.
Paulette rentre tôt car la cloche se réveille de bonne heure le matin à l’école communale.
Mais rapidement nous comprenons que notre idée de jouer un spectacle de café théâtre à Megève pour, principalement des Parisiens qui ont tout ce qu’il faut comme lieux d’amusement à Paris, n’est pas la meilleure idée.
Les vacanciers viennent faire du ski et vont se coucher tôt pour être en forme le lendemain ou bien ils vont boire un verre dans une boite de jazz ou voir un spectacle de transformistes, mais, aller voir deux gugusses inconnus, c’est une autre paire de manche…
Le plus beau souvenir est le jour où nous arrivons avec Louis dans notre lieu de rêve et qu’une odeur pestilentielle nous saute aux narines.
Nous montons voir le patron du bar tabac PMU et très vite nous avons l’explication.
Les eaux usées de tout l’immeuble passent dans des canalisations situées sous notre scène et l’une d’elles, en raison du gel de la nuit précédente, a pété !
Une heure avant la représentation, nous balançons quatre bombes de désodorisant, entre parfum menthe, fruits des îles, citron de Madagascar et fleurs tropicales.
Nos femmes font la régie en portant des masques sur le nez, le public n’est pas dupe, nous devons faire une annonce nous excusant de cette soirée « odorama » mais pour couronner le tout, nous avons un problème électrique.
En plein milieu des sketches, le compteur disjoncte suivant son bon vouloir, de façon très aléatoire. Le public s’y perd entre ces coupures et les vrais noirs lumière de fin de sketches...
Du coup, un des spectateurs se tient debout et dès que ça saute, hop, il appuie sur le bouton du disjoncteur. Il viendra saluer à la fin de la soirée, heureux d’avoir mis la main à la pâte, enfin, façon de parler !
Il faut croire que notre prestation artistique n’était pas si mauvaise car le public était heureux de passer des moments, certes un peu saugrenus, mais tellement rares !
Avec Louis et notre « productrice », nous comprenons vite que le seul moyen de rentabiliser l’affaire, du moins de ne pas trop bouffer la grenouille, est de jouer ailleurs.
Nous démarchons les centres de vacances, les mairies, les maisons de retraite, bref tous les lieux susceptibles d’accueillir spectacles et ateliers divers.
Gros succès ! Nous voilà partis sur les routes de France à nous donner en représentation.
Peu à peu nous remboursons Paulette. Nous sommes même embauchés plusieurs fois dans un centre de vacances des impôts qui à chaque fois nous paye au noir !!!
Puis vint une grosse tournée entièrement organisée par un administrateur, le bon Olivier, avec la famille Pilard, célèbres clowns, Patrick Valérian le chanteur et son musicien.
Une super équipe de branquignols, toujours prêts pour la rigolade tout en restant très pros.
Seule ombre au tableau, en pleine tournée, le guitariste de Patrick s’effondre sur les marches d’une église, crise cardiaque foudroyante.
Après deux jours d’interruption, le spectacle reprend, comme le veut la tradition, et nous repartons faire rire, le cœur gros, avec à chaque chanson une pensée émue pour Roland le musicien qui est parti donner la sérénade aux anges.
De retour à Praz, à la fin de cette tournée, nous manquons de peu d’aller rejoindre Roland...
Je conduisais ma R5 et à une centaine de kilomètres de l’arrivée, la voiture se déporta doucement sur la gauche vers un ravin.
Je m’étais endormi après avoir roulé une bonne partie de la nuit et le réflexe de Louis qui redressa le volant fut salvateur. Il ne dormait que d’un œil !
Puis ce fut l’heure du bilan. Je voulais être comédien, cette fois, j’en étais sûr, donc il fallait que je « monte » à la capitale.
Louis avait sa vie en haute Savoie, sa femme Paulette, ses enfants.
Son atelier marchait bien, on décidait donc de se séparer et de suivre chacun sa route.
Cela me toucha énormément lorsque, quelques années plus tard, il m’avoua au téléphone qu’il était allé me voir au cinéma dans « Les Ripoux » et qu’à la fin de la séance, il s’était levé pour applaudir, les yeux bien chargés d’émotion.
Sacré Louis, incroyable Paulette…
Nous nous voyons toujours et, comme des anciens combattants, nous ne parlons, encore une fois que des bons moments !
A la moitié du printemps, nous montons à Paris avec Bernadette, afin que je puisse trouver pour la dernière fois un poste d’animateur, afin de mettre un peu d’argent de côté, et elle de réceptionniste.
Suite à quoi, Paris, cours d’art dramatique, castings, rôles, bref enfin, le grand bain…
Au risque de boire de bonnes tasses!
Mais tout ça ne s’est pas fait si facilement…
« A tout bientôt !!! »