Nous finissons de tourner à Malte les séquences de bateau pendant lesquelles nous buvons des tasses mémorables, nous mettons en boîte celles du « Radeau de la Méduse » et autres…
Nous faisons une fête avant de quitter nos marins maltais qui sont en pleurs. Véridique !
Ils nous disent que c’est le plus beau tournage auquel ils ont participé tant l’ambiance était bonne, l’équipe si gentille avec eux, les traitant d’égal à égal.
Merci Monsieur Chabat !
Ils nous offrent à tous un tee shirt sur lequel est inscrit :
« Send the wind, send the waves » (Lire épisode précédent)
Reste à tourner la séquence où Obélix, nageant façon Laure Manaudou, percute notre bateau et le coupe en deux ainsi que celle de l’énorme boulet qui vient exploser notre embarcation.
Direction les oueds marocains pour quatorze semaines de tournage.
Nous, les pirates, ne resterons qu’une quinzaine de jours.
A Zagora, dans un oued à sec, un énorme sillon de 200 mètres a été creusé afin d’y poser rails et poulies sous-marines suffisamment puissantes pour que trois maquettes de bateaux de huit mètres de long puissent y être déplacées.
Ensuite pour que l’oued puisse ressembler au Nil il a fallu, pour le remplir, libérer l’eau d’un barrage situé en amont. C’est pas la mer à boire, mais presque…
Cette eau a mis deux semaines pour arriver « à bon port »!
Sur notre « faux Nil », nous avons le plaisir de revoir nos marins Maltais à qui la production a fait faire le voyage jusqu’au Maroc.
Nous arrivons très tôt le matin pour tourner afin de profiter d’une lumière exceptionnelle et d’une moindre chaleur. La nuit tombe vite et le froid aussi ! L’hiver est plutôt rude au Maroc. Fin d’après-midi, c’est doudoune pour tout le monde.
Nous avons tourné pas mal de scènes qui n’ont pas été montées.
Il ne faut pas non plus diluer le film en allant dans tous les sens.
Tout a été tellement bien préparé en amont que la scène où le bateau explose
lorsque Obélix, nageant sur le dos, le traverse de part en part, se passe à merveille.
Entre la conception, la préparation, la fabrication, le
tournage et la post-production, une centaine de personnes, de "magiciens", ont travaillé pendant près d’un an sur cette séquence pendant laquelle Obélix tire les 15 felouques chargées de
tonnes de pierre. L’improvisation n’est pas de mise !
Pendant ce temps, en plein cœur du désert marocain se construit le Palais de César, sous la houlette de l’immense chef décorateur Hoang Thanh At(Sept ans au Tibet ou encore l’Amant).
Un demi-millier d’ouvriers marocains et français, sous un soleil de plomb, va œuvrer afin que tout soit près pour le tournage. Si vous revoyez le film, ça mérite un petit coup « d’image par image », tellement chaque petit détail a été pensé et réalisé avec précision.
Hoang Thanh At a recréé pour la scène du palais en chantier des tas d’objets, outils des sculpteurs, les grues et autres engins de levage…
L’équipe costumes a dû habiller et chausser plus de 2000 figurants pour donner à l’image l’impression d’une fourmilière gigantesque travaillant à la construction du palais. Il a même fallu apprendre à certain à tenir un outil pour sculpter, tailler la pierre ou tirer un traîneau. Eh oui, c’est un métier !
Pour cause de tempêtes de sable, le tournage fut stoppé pendant deux jours.
Ca c’est galère ! 2000 figurants ensablés !!!
Il fallut également engager un charmeur de serpents car ces gentilles bestioles
venaient s’inviter pour faire de la figuration avec leurs copains les scorpions, araignées et autres…
Alain Chabat, lui, s'était fait un copain.
Le soir, après le tournage, nous nous retrouvons entre comédiens et techniciens.
Le tournage avait commencé depuis un bon moment au Maroc lorsque nous, les pirates, avons quitté Paris pour rejoindre l’équipe.
Sachant qu’ils étaient « en manque » nous avons eu la bonne idée d’emporter dans nos bagages saucissons, vins, pains et fromages de France…
Quel bonheur pour l’équipe de retrouver un peu la France avec des odeurs un peu plus familières que
celles du jasmin ou de l'excrément de chameau...
Cette ambiance de film était celle d’une colonie de vacances, nous avions du mal à nous quitter mais tout a une fin. Vous vivez une immense histoire d’amour sachant très bien qu’elle va finir tôt
ou tard.
« Afin de faire perdurer la nôtre », avec mon ami Bernard Farcy, qui ne connaissait pas le Maroc, nous décidons, à la fin du tournage, de nous poser une semaine dans un Riad à
Marrakech. Je connais la ville et me propose de faire le guide.
Nous prenons un taxi qui va nous conduire de Ouarzazate à Marrakech.
Nous passons pas mal d’heures faites de routes sinueuses dans un vieux taxi « sans climatisation » pour arriver enfin sains et saufs.
Plusieurs fois Bernard Farcy, a voulu prendre le volant car notre chauffeur,
adorable au demeurant, ressemblait plus à un vrai faux pseudo Alain Prost sans en avoir vraiment les compétences.
Notre Riad était en plein cœur du Souk. Avec Bernard, nous partions, après un super petit-déjeuner, à la découverte de la vie des boutiques colorées des marchands.
Je ne peux m’empêcher de citer Charles Baudelaire…
La nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
Il est des parfums frais comme des chairs
d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
- Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,
Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.
C’était la page culturelle…
Nous nous rendons tous les deux presque chaque soir sur la célèbre « Place Djamel El fna » afin d’y déguster la cuisine marocaine. La journée, je fais découvrir à Bernard les
souks, l’incontournable et fatigant marchandage.
Lorsque nous passons, les marchands nous lancent régulièrement :
« Bijour Laurel et Hardy ! » ou « Bijour Astérix et Obélix »
Ce qui nous amuse, évidemment.
Profitons d’un petit répit, se sont installés dans un luxueux hôtel Isabelle
Nanty, Edouard Baer et Charles Berling.
Isabelle met en scène la pièce « Cravate Club » sur Paris. Ils en profitent ainsi pour, entre deux séances piscine, répéter la pièce.
Nous venons passer la journée avec eux avant de retourner dans notre Riad et préparer nos valises pour rentrer sur Paris.
Nous nous retrouverons au mois de janvier dans les studios d’Epinay sur Seine afin de tourner les scènes dans lesquelles les pirates font marcher l’invention d’Otis, à savoir l’ascenseur.
Laurent Dailland, directeur de la photo, fait des merveilles car il faut raccorder parfaitement l’ambiance « lumière ».
Le soleil de Malte n’est pas le même qu’au Maroc ou à Epinay sur Seine.
Le public doit avoir l’impression que toute l’histoire s’est passée au même endroit. La séquence de la Gaule enneigée est à part car là, la lumière doit être plus froide, voire glaciale.
Que de gens de talent sur ce film ! Résultat des courses :
En 2003, le film obtient le César des meilleurs costumes qui est attribué à Philippe Guillotel, Tanino Liberatore et Florence Sadaune, et croyez-moi, c’était mérité.
Trois nominations aux Césars :
Meilleur décor pour Hoang Thanh At.
Meilleur second rôle pour Gérard Darmon et Jamel Debbouze
Je vous redonne l’adresse du « making of », c’est à
voir…
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=18669226&cfilm=28537.html
Je vous le dis…
Si Alain Chabat me contacte pour un autre film, c’est où il veut et quand il veut !
Au fait, vous ne m'auriez pas vu dans le rôle d'Astérix???
« A tout bientôt !!! »